La malédiction du château de Lunéville (Lorraine)

La malédiction du château de Lunéville (Lorraine)

Il fallut une vingtaine d’années pour finir la construction du château de Lunéville. Ce palais ducal est inspiré selon la volonté du duc Léopold (1679-1729) des plans du Château de Versailles. La demeure connaît une grande renommée grâce aux embellissements de Stanislas Leszczynski, on le nomme alors le « château des lumières ». Stanislas de Pologne, Duc de Lorraine, est un homme cultivé, passionné de littérature. Maîtrisant cinq langues, l’homme a visité toutes les capitales d’Europe et fait du château la figure de proue de l’effervescence intellectuelle et philosophiques du XVIIIe siècle.

Le récent incendie du château de Lunéville en janvier 2003 a ravivé la croyance en une malédiction qui frappe le château depuis 1719. A quelques heures près un incendie s’était déclaré à cette date dans des circonstances toujours non élucidés. A cours des siècles, la palais a subi 13 incendies, on dit qu’il s’agit de la colère d’un curieux personnage…

Une longue série d’incendies

On retrouve,en effet, facilement les mentions à ces incendies dans de nombreuses sources. Bien que les causes des incendies soient souvent attribuées aux bougies qu’autrefois on utilisait pour éclairer les pièces et à l’omniprésence des boiseries. Les autorités ne s’expliquent pas l’origine de deux plus récents dans ce bâtiment réhabilité qui abrite aujourd’hui le Conseil Général de Meurthe et Moselle. Voici la liste non exhaustive des différents incendies déclarés dans ce château.

  • Le 03 janvier 1719, le feu détruit en quelques heures toute la partie sud-est comprenant les appartements ducaux et une partie du corps central.
  • 1744, le feu se déclare au premier étage dans l’aile de l’avant cour.
  • Le 6 février 1755, l’incendie se propage au même endroit qu’en 1744.
  • Le 11 décembre 1759
  • La nuit du 11-12 juillet 1762
  • Le 5 février 1766, la robe de chambre de Stanislas Leszcynski prend feu, une femme de chambre arrive en entendant les cris de son maître pour éteindre les flammes. Il lui aurait dit « Qui eut dit, Madame, qu’un jour nous brûlerions des mêmes feux ? ». Il décèdera des suites de ses brûlures le 23 février.
  • En 1789, le feu se propage dans les cuisines du sous sol.
  • La nuit du 1er-2 janvier 1814, l‘incendie détruit une partie de l’aile nord.
  • Le 23 novembre1849, l’incendie se déclare au même endroit quand 1719 provoquant d’importants dégâts côté sud.
  • En 1871
  • Le 19 Mars1961, 300 à 500 m2 de toiture sont ravagés par les flammes sur l’aile gauche du château.
  • La nuit du 2-3 janvier 2003, le feu se déclare dans la charpente de la Chapelle du château détruisant une grande partie des collections du Château de Lunéville.

La vengeance du nain Bébé

Nicolas Ferry est né le 11 novembre 1741 à Champenay dans les Vosges. L’enfant frappé de nanisme acquière une grande réputation dans la région jusqu’à ce que Stanislas Leszczynski en entende parler. Alors que Nicolas à 5 ans, Stanislas demande à son père de lui confier l’éducation de l’enfant et qu’il lui tienne compagnie. Nicolas est alors surnommé « Bébé » par le roi de Pologne. Bébé est un garçon au caractère changeant tantôt rieur, tantôt irascible et coléreux. A la moindre contrariété, Bébé envoie valser la vaisselle ou boude dans son hôtel de bois que Stanislas a fait faire pour lui dans une pièce du château.

Pour calmer sa colère, le roi de Pologne cède à ses caprices en lui offrant une friandise ou un costume. Personne dans le château n’ose rabrouer Nicolas Ferry qui parade dans une calèche tirée par 4 chèvres, un autre cadeau du roi. Un jour excédé de voir sa préceptrice, la princesse de Talmont, caresser un petit chien, Bébé prend l’animal et le jette par la fenêtre. Il ne supporte pas qu’on ne lui prête pas attention.

En 1759, fou de jalousie, il tente de jeter dans le feu Joujou (Joseph Buruslawski), le nain de Mme Humircka, cousine de Stanislas, plus petit de 14 cm que lui et surtout plus intelligent. L’épisode sera à l’origine de la légende. On dit que Stanislas et Nicolas Ferry avaient passé un pacte. Le roi de Pologne ne l’ayant pas respecté, la colère du spectre de Bébé déclencherait depuis des siècles ces incendies. Nicolas Ferry aurait, en effet, demandé à son maître de lui trouver une épouse. Aprés de nombreuses recherches, Stanislas de Pologne tente de le marier avec Thèrése de Sauvay, une naine des Vosges. Mais Nicolas bien qu’âgé de vingt ans est rongé par un mal étrange qui le fait ressembler à un vieillard. Le mariage n’aura jamais lieu. Depuis condamné à la solitude, il piquerait des colères déclenchant le feu dans le château. Certain sont persuadés qu’il est à l’origine de la mort du Duc Stanislas.

En dehors du château de Lunéville, Nicolas était surnommé le « Nain Jaune » en référence au personnage cruel du conte de la Baronne Aulnoy publié en 1698. En 1760, en Lorraine, apparait un nouveau jeu de cartes baptisé « jeu du nain Bébé » que nous connaissons aujourd’hui sous le nom du « jeu du nain jaune ». Bébé meurt d’une grippe le 8 juin 1764 à 23 ans.

Sarah Hubert-Marquez

 

Acte de décès de Stanislas roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar

(Extrait du registre de Paroisse de Lunéville)

L’an dix sept cent soixante six, le vingt troisième février, à quatre heures quatre minutes du soir, est décédé en son château de cette ville, très haut, très puissant et très excellent Prince Stanislas Leszczynski, roi de Pologne, Grand-duc de Lithuanie, etc., Duc de Lorraine et de Bar, etc., age de quatre-vingt huit ans trois mois et vingt trois jours, veuf de très haute, très puissante et très excellente princesse Catherine Opalinska, après avoir reçu les sacrements de Pénitence, d’Eucharistie en Viatique et d’Extrême-Onction. Les entrailles de ce prince, si digne de nos regrets, ont été déposées dans le caveau des chanoines réguliers de la maison de St Remy de cette ville, come il conste par le procès-verbal dressé, recto, de ce registre. Son corps embaumé, qui était resté exposé pendant huit jours dans une chapelle ardente dressé à cet effet dans la chambre appelée la chambre d’honneur, après que la levée en a été faite, avec les prières et cérémonies ordinaires, par le chapitre des chanoines réguliers, ayant pour ce moment à sa tête, son Eminence, qui en a a récité la collecte et à qui il n’a été fait aucune difficulté à cet égard, à cause de sa dignité, a été transporté, le troisième mars, et conduit par son Eminence Monseigneur le cardinal de Choiseul, son grand aumônier, monseigneur de le Prince  de Beauvau grand maître de sa maison, le R.P. Louskina son confesseur, et le soussigné curé de Lunéville, accompagné de MMrs les aumôniers ordinaires portant chacun du poile, des grands officiers de la couronne et duchés, seigneurs de la Cour, en l’église des RR.PP. Minimes de Bonsecours, et a de suite été déposé dans le caveau royal y construit par les ordres de sa Majesté. De tout quoi procès-verbal a été dressé par Monseigneur de La Galaizières, Intendant de Lorraine et Barrois, commissaire en cette part. Et le présent acte a été dressé sur ce registre et signé par les chanoines réguliers de ma Maison de St Remy

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